La vie repose sur le silence est né lors d’une résidence réalisée en Norvège au monastère de Halsnoy autour du livre La barque le soir, de l’écrivain Tarjei Vesaas dont j’aime l’univers et le rapport à la nature. Je suis attirée par cette notion de passage qu’il explore sans cesse, entre le bien et le mal, l’ombre et la lumière, l’eau et la terre. Son écriture traduit les allers-retours dans les «méandres» du cerveau, ces va-et-vient entre brume et clarté, entre le réel et le rêve. […]
C’est ainsi qu’il dresse des cathédrales de glace où le silence retentit, où le temps est suspendu à mi-chemin entre la vie et la mort. Autant de notions qui font écho aux thèmes qui m’intéressent, ce rapport très fort à la matière, ces personnages étranges et purs, toujours un peu à part du reste de l’humanité et qui savent voir au-delà des apparences, pris dans le silence qui leur permet de se retirer en eux-mêmes, comme partis à la recherche de mondes intérieurs, voyages où domine toujours l’idée de passage, de basculement. Ce moment où les choses ne sont plus ce qu’elles étaient mais deviennent autres, où le rêve a parfois plus de force que le réel, cette passerelle entre le concret et l’abstraction que je m’efforce d’exprimer en créant une confusion entre photographie et peinture. Entrer dans l’univers de Tarjei Vesaas, dans cet univers de terre et d’eau, de glace et de forêts, de neige et de brume, c’est, selon les paroles de l’écrivain lui-même : Ne pas comprendre, mais être à proximité de ce qui se passe.
Je m’intéresse aussi au travail de Anna-Eva Bergman car l’oeuvre du peintre et celle de l’écrivain se font écho comme une double lecture. Il y a, en effet, une résonance qui s’établit de l’un à l’autre, à travers le paysage, thématique essentielle de la création littéraire comme de la création picturale, à travers leur recherche personnelle mais complémentaire de la lumière et de la matière, et le jeu entre la réalité et l’interprétation de la réalité.
2016
L’Heure du loup 1 par Fabien Ribery dans l’Intervalle
L’Heure du loup 2 par Fabien Ribery dans l’Intervalle